Critiques

KATOTAKIS: CONQUÉRANT COMME NAPOLÉON

KATOTAKIS: CONQUÉRANT COMME NAPOLÉON

PHOTO: Dimitri Katotakis
(Crédit: Philip Crozier)

Qu’elle soit admirée par les uns ou rejetée par les autres, la figure de Napoléon ne laissait personne indifférent, surtout chez les contemporains de l’empereur français. Les mélomanes connaissent l’admiration que lui vouait Beethoven, jusqu’à ce fameux jour où l’auteur de l’« Héroïque » ratura furieusement la dédicace qu’il lui avait faite. À ses yeux, Napoléon passait du statut d’inspirateur de l’esprit révolutionnaire à celui d’envahisseur sanguinaire.

C’est avec ces idées contraires en tête que la Fondation Arte Musica présentait le concert « Ode à Napoléon ». Le baryton canadien Dimitri Katotakis interprétait trois mélodies différentes, mais toutes composées sur le même texte : un poème de Henrich Heine intitulé « Die beiden Grenadier » (« Les deux grenadiers »). Accompagné au piano par Stéphane Lemelin, le chanteur devenait récitant, changeant ainsi totalement de style, dans une œuvre pamphlétaire d’Arnold Schoenberg avec quatuor à cordes.

La première mélodie était celle de Carl Gottlieb Reissiger, compositeur qui n’est pas passé à l’Histoire parmi les grands noms de la musique romantique et qui, en l’occurrence, a produit une pièce d’un intérêt limité. Neuf ans plus tard, en 1840, Robert Schumann reprit le poème et composa une mélodie caractérisée par une citation de La Marseillaise. Plus subtil quant à ses allusions à l’hymne français, qu’il réserve à l’accompagnement seulement, Richard Wagner était l’auteur de la troisième mélodie. Ce dernier recourut à une traduction française du même poème, une langue qui convenait moins bien au baryton que l’allemand original. La prestation de Dimitri Katotakis demeura néanmoins d’excellente qualité. Il enveloppait toute la salle de sa voix puissante et faisait entendre au public, malheureusement peu nombreux, toute une palette de couleurs pour interpréter ces pièces. Dans l’œuvre de Schoenberg, sur un texte antinapoléonien de Lord Byron, le chanteur a prouvé ses qualités de conteur et son aisance dans la langue de Shakespeare, avec ses accents et ses intonations parfaitement maîtrisés.

Le quatuor Saguenay, anciennement quatuor Alcan, revenait sur scène pour la dernière œuvre du programme : le Quatuor no 4 avec piano de Beethoven, comme un clin d’œil à l’Histoire.

Ode à Napoléon

Œuvres de Schumann, Wagner, Reissiger, Schoenberg et Beethoven.

Production
Fondation Arte Musica
Représentation
Salle Bourgie , 2 février 2018
Interprète(s)
Dimitri Katotakis (baryton et récitant), Stéphane Lemelin (piano), et le quatuor Saguenay : Laura Andriani (violon I), Nathalie Camus (violon II), Luc Beauchemin (alto) et David Ellis (violoncelle)
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