CRITIQUE - Starmania par le Nouvel Opéra Métropolitain : Des prestations émouvantes devant un librettiste heureux...Luc Plamondon
Produit par le Nouvel Opéra Métropolitain (NOM), ainsi qu’est dénommée la division lyrique du Festival Classica, l’opéra Starmania était présenté le samedi 8 juin 2024 dans le céleste décor de la Co-cathédrale Saint-Antoine-de-Padoue dans l’arrondissement du Vieux-Longueuil. Et c’est devant une nef et un transept remplis à pleine capacité que de jeunes artistes lyriques du Québec ont interprété l’œuvre de Michel Berger et Luc Plamondon, réinventée pour souligner le 20e anniversaire de la version symphonique préparée par l’arrangeur-compositeur Simon Leclerc.
De cette soirée, il faut retenir d’abord et avant tout des prestations émouvantes des membres d’une distribution judicieusement choisie par le directeur général et artistique Marc Boucher, au premier chef desquelles l’on trouve celles de la soprano Suzanne Taffot. Dans son rôle de Marie-Jeanne, l’interprétation des airs composés pour la serveuse-automate a été attendrissante dans « La Complainte de la serveuse-automate », tendre dans « La Chanson de Ziggy » et bouleversante dans « Le monde est stone ». Et que dire de la beauté du timbre et la qualité de la diction qui font de cette chanteuse l’une des plus belles découvertes de notre scène lyrique québécoise de la présente décennie.
Suzanne Tafffot
La serveuse automate
Starmania
Nouvel Opéra Métropolitain, 2024
Il en est allé de même pour Sophie Naubert, la résidente de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal qui avait, l’avant-veille, chanté dans la production du NOM de l’opéra Der Kaiser von Atlantis de Viktor Ullmann. Celle-ci a mis ses talents de colorature au service du rôle de Stella Spotlight, particulièrement dans « Les adieux d'un sex symbol » et « Le rêve de Stella Spotlight ». Ce dernier air a clôturé brillamment la soirée et a permis à ceux qui, comme le soussigné, avaient assisté à la co-production de la même oeuvre par les Opéras de Québec et de Montréal en 2008, et sa reprise au Festival d’opéra de Québec de en 2016, effectuer la comparaison avec l’interprétation de Lyne Fortin.
Sophie Naubert
Starmania
Nouvel Opéra Métropolitain, 2024
L’un des grands moments de la soirée aura été sans nul doute l’interprétation par le ténor Emmanuel Hasler du célébrissime air « Le Blues du businessman ». D’une puissance sidérante, la voix de ce ténor français ayant fait du Québec son pays d’adoption a électrisé la foule et a valu au Zéro Janvier de cette production une ovation debout initiée par nul autre que Luc Plamondon, présent pour l’évènement et, de toute évidence, un librettiste heureux.
Jacques Lacombe et Emmanuel Hassler
Starmania
Nouvel Opéra Métropolitain, 2024
Le baryton Hugo Laporte s’est aussi distingué en incarnant le personnage de Johnny Rockfort avec conviction et en offrant une interprétation remarquable de l’air « Le Terrien en détresse », d’une étonnante difficulté et complexité au plan vocal. Sa prestation lui valut de chauds (et mérités) applaudissements du public.
Dans leurs rôles respectifs de Cristal et Sadia, la soprano Marianne Lambert et la mezzo-soprano Florence Bourget ont également livré de très belles prestations. Si le ténor Mishael Eusebio s’est généralement bien acquitté de la responsabilité d’incarner le personnage du DJ Ziggy, la projection et la justesse n’étaient pas toujours au rendez-vous.
Florence Bourget, Hugo Laporte et Marianne Lambert
Starmania
Nouvel Opéra Métropolitain, 2024
Et que dire d’un chœur composé d’artistes si talentueux sinon dans les « Monopolis A et B », repris en rappel, sinon qu’ils ont su transporter davantage un public déjà séduit par les solistes dans l’univers mythique de Starmania.
Le chef Jacques Lacombe, dont l’expérience dans le monde lyrique est immense, s’est avéré un choix judicieux. Celui-ci a fort bien guidé les instrumentistes de l’Orchestre classique de Montréal et a fait honneur à l’arrangement symphonique de Simon Leclerc, en exploitant ses plus belles couleurs.
L’idée d’inclure Starmania dans la deuxième saison du Nouvel Opéra Métropolitain s’est avéré un pari réussi et il est à espérer que le tandem Marc Boucher et Isabeau Proulx-Lemire nous offre à nouveau l’occasion d’entendre des versions lyriques de certaines œuvres québécoises et francophones qui permettront en outre aux artistes lyriques d’être mis en valeur dans un genre musical.
Et, pour ceux et celles qui veulent assister à nouveau à Starmania, la production mise en scène par Thomas Joly (à qui le Comité organisateur des Jeux Olympiques de Paris a d’ailleurs confié la préparation de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques d’été de 2024 à Paris) qui a fait sensation à La Seine musicale dans la Ville-Lumière et lors de sa tournée dans de nombres villes de France, sera présentée au Québec, et plus précisément à Laval du 6 au 18 août 2024.
Starmania
Oeuvre de Michel Berger sur un livret de Luc Plamondon arrangé pour orchestre par Simon Leclerc
ORC : Orchestre classique de Montréal
- Production
- Nouvel Opéra Métropolitain (NOM)
- Représentation
- Cocathédrale Saint-Antoine-de-Padoue , 8 juin 2024
- Direction musicale
- Jacques Lacombe
- Interprète(s)
- Suzanne Taffot (Marie-Jeanne, La serveuse automate), Florence Bourget (Sadia, Le travesti), Marianne Lambert (Cristal, L’animatrice télé), Emmanuel Hasler (Zéro Janvier, Le business man), Hugo Laporte (Johnny Rockfort, Le chef terroriste), Mishael Eusebio (Ziggy, Le dj), Sophie Naubert (Stella Spotlight, Le sex-symbol)