FESTIVAL DE LANAUDIÈRE- Michael Spyres : La leçon de chant du « Caméléon de Mansfield »

« Michael Spyres intime »
Œuvres de Haydn, Beethoven, Schubert, Berlioz, Bellini, Verdi, Tchaïkovski, Donaudy, Britten et autres
Production : Festival de Lanaudière
Église de l'Assomption-de-la-Sainte-Vierge, 11 juillet 2019
INT : Michael Spyres (baryténor)
PIA : Mathieu Pordoy (piano)
Accompagné de Mathieu Pordoy au piano, le baryténor américain Michael Spyres a donnait à l’église de l’Assomption, en une belle soirée de l’été 2019, une véritable leçon de chant.
S’il est très en vue en Europe et tend à se tailler une place parmi les plus grands chanteurs de notre époque, Michael Spyres a dû attendre l’invitation du Festival de Lanaudière pour pouvoir se produire au Canada… et plus précisément au Québec, un détail que le baryténor a pris en compte. S’exprimant en tout temps dans un français soigné, il a communiqué au public son enthousiasme teinté d’humour et son sursaut d’inspiration en partie dû au cadre et à l’acoustique remarquables de l’église ainsi qu’aux éléments qui se sont déchaînés de manière spectaculaire plus tôt dans la soirée, plongeant une partie de la ville dans le noir.
Si le répertoire du récital était en apparence assez décousu et constitué de nombreuses œuvres méconnues ou peu chantées, il a permis au natif de Mansfield, petit village du Missouri, de dévoiler l’étendue prodigieuse de ses facultés de caméléon vocal, fruit d’une expérimentation de longue date sur sa voix et de nombreuses heures d’étude de différentes techniques des maîtres du passé – Andrea Nozzari, Adolphe Nourrit ou Gilbert Duprez, auxquels il rend hommage dans plusieurs enregistrements.
J’emploie à dessein le terme de baryténor, un terme hors du commun pour une voix qui l’est également. Baryton aux aigus très développés, Michael Spyres est capable d’incarner aussi bien le répertoire de Britten, limpide, souple et aérien, que celui de Verdi, des graves caverneux jusqu’au séraphique « ut de poitrine » que lui a sans doute inspiré Duprez. Il module, transforme et colore sa voix avec une aisance déconcertante, du comique au dramatique en passant par le lyrique.
Mathieu Pordoy, au piano, n’était pas en reste cette soirée-là, accompagnant les flux et reflux de cette marée vocale avec une grande attention, un soutien de tous les instants et même une participation chantée! Les deux musiciens ont pris le temps de souligner l’accueil exceptionnel qui leur avait été réservé par le Festival, et chacun aura pu le sentir à travers ce concert particulièrement inspiré et généreux –16 pièces et 3 rappels – même si la tablette qui séparait le chanteur du public accaparait parfois l’attention au détriment de l’émotion.
Comme dernier rappel, Spyres a tenu à nous faire découvrir, dans une version en français et anglais, une chanson traditionnelle apportée par des Canadiens français au XVIIIe siècle jusque dans le Missouri. Elle commence par « Ô Charlot, j’aime ta fille… » Une attention très touchante qui montre qu’au-delà du technicien hors pair, de l’explorateur infatigable de son art et du communicateur avisé se cache un être d’une grande sensibilité, généreux et soucieux du public. Nous voulons revoir Michael Spyres au Québec, et le plus tôt sera le mieux!
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