COUP D’ŒIL SUR LA RELÈVE - Si seulement j’avais été dans l’espace : Une deuxième production pour l’Opéra Théâtre du Miroir

En avril 2021, l’équipe de L’Opéra s’entretenait pour la première fois avec Paolo Sangaré-Mermin, fondateur de la jeune compagnie lyrique l’Opéra Théâtre du Miroir, qui était alors sur le point de lancer sur le web le projet Éphéméride. Un an plus tard, la compagnie propose un tout premier spectacle en présentiel mélangeant théâtre et art lyrique. Coup d’œil sur la deuxième production de l’Opéra Théâtre du Miroir, organisation aux valeurs ancrées dans la réalité du XXIe siècle.
Si seulement j’avais été dans l’espace, c’est un projet que Paolo Sangaré-Mermin prépare depuis longtemps. En effet, le co-auteur et metteur en scène a commencé à écrire des textes pour ce spectacle il y a quelques années, en 2016. La tenue des répétitions pour la première mouture de la production ayant été impossible en raison du début de la pandémie en 2020, la compagnie s’est plutôt concentrée sur Éphéméride, une œuvre interdisciplinaire mélangeant chant, danse, musique et théâtre. Développée pour être présentée exclusivement sur les réseaux sociaux comme Instagram et Facebook, l’œuvre complètement virtuelle a permis à l’Opéra Théâtre du Miroir de se faire connaître malgré la fermeture des salles de concert et de mettre de l’avant son désir d’offrir des spectacles qui se distinguent des productions traditionnelles offertes par beaucoup de compagnies lyriques.
L’histoire de Si seulement j’avais été dans l’espace est celle d’une femme disparue depuis longtemps. Le public apprend à la connaître à l’aide de la lecture de son courrier, qui s’accumuledepuis sa disparition. Ainsi, on découvre la protagoniste exclusivement à travers le regard des autres, ce qui met en lumière une réalité qui fait partie de notre quotidien : peu importe nos agissements et nos efforts, tout le monde peut avoir sa propre vision de nous. Ce spectacle devait à l’origine être une pièce de théâtre, mais son co-auteur a cru que le message serait mieux véhiculé à travers le mariage des arts du théâtre et de l’opéra. Il a alors intégré des mélodies françaises du répertoire impressionniste – notamment de Poulenc et Debussy – à ses textes afin de compléter l’œuvre.
Questionné sur les raisons qui l’ont poussé à se tourner vers les mélodies françaises, Sangaré-Mermin nous a expliqué avoir eu une démarche spécifique pour la confection de Si seulement j’avais été dans l’espace. Afin de créer une œuvre qui rejoindrait un public large, il s’est adressé à son entourage en leur demandant ce qui les décourageait d’aller à l’opéra. Des réponses comme la longueur des productions, la difficulté à comprendre les paroles chantées et le besoin de voir un spectacle traitant d’un sujet actuel ont donc poussé Sangaré-Mermin à opter pour la mélodie française. Selon lui, les textes choisis se transposent sans difficulté à notre époque et la texture dépouillée de fioritures de la mélodie française – ainsi que la langue –permettent une compréhension adéquate des paroles. Ainsi, en plus de s’assurer que ses proches viendraient voir son spectacle, il a su répondre à un besoin d’actualisation de la pratique lyrique et s’assurant d’offrir un spectacle accessible.

Lila Dufy, dans Si seulement j’avais été dans l’espace, Opéra Théâtre du Miroir, 2022
Photographie : Daniela Sanchez
Une pandémie ou presque plus tard, cette production a cependantsubi quelques modifications. En plus de changements en ce qui a trait à la distribution, le contenu du spectacle s’est transformé, tout comme son co-auteur. À ce sujet, Sangaré-Mermin nous a confié que les dernières années de confinement l’ont fait évoluer comme personne et comme artiste ; cela l’a encouragé à revoir certaines composantes de son spectacle. Parmi celles-ci, ilévoque notamment le choix en ce qui concerne les artistes mobilisés pour la production, tant sur la scène que derrière la scène. Il est dans les valeurs profondes de la compagnie de promouvoir la diversité et l’inclusion dans ses productions et c’est cela qui caractérise l’équipe entière de Si seulement j’avais été dans l’espace. « La présence de personnes racisées [dans la production] a été partie prenante de nos discussions, et se retrouver ensemble nous a permis d’échanger et de nouscomprendre », précise Sangaré-Mermin. En ce sens, c’est lui qui recrute toutes les personnes impliquées dans ses projets, ce qui lui permet peu à peu de bâtir une communauté artistique formée de personnes issues de la diversité tant ethnique qu’en ce qui concerne la question du genre.
Avec son nouveau spectacle, l’Opéra Théâtre du Miroir souhaite offrir un voyage en apesanteur à son public, en leur faisant (re)découvrir des mélodies françaises douces et inspirantes. Afin de recréer cette sensation de légèreté, les mélodies sont interprétées à la harpe plutôt qu’au piano. Quant aux textes, ils ont été conçus pour « faire rire et réfléchir, sur un fond de science-fiction, mais pas trop ! ». Si seulement j’avais été dans l’espace invite donc à rêver, à rire et à pleurer, mais surtout à faire du bien.
Qu’est-ce qui attend la compagnie pour le futur ? Rien de moins qu’une autre production, intitulée Category is Baroque !Regroupant cinq musiciens et musiciennes spécialistes de la musique baroque et cinq danseurs et danseuse de voguingprovenant de la scène ballroom montréalaise, ce prochain spectacle conjuguera la danse au répertoire de Vivaldi. Bienqu’imaginé dans un premier temps pour le web, Paolo Sangaré-Mermin espère pouvoir également présenter ce spectacle en salle. Il souhaite d’ailleurs lancer un appel aux propriétaires de salles : la compagnie lyrique est à la recherche d’un endroit où produire ce prochain projet. En attendant, il sera possible d’aller entendre les dernières représentations de Si seulement j’avais été dans l’espace les 18 et 19 juin 2022, au studio multimédia du Conservatoire de musique de Montréal. Pour vous procurer des billets, c’est ici.