PORTRAIT JEUNE ARTISTE – MYRIAM LEBLANC
PHOTO: Myriam Leblanc
(@ Brent Calis)
C’est avec joie que nous vous proposons cette rencontre avec une jeune artiste lyrique en début de carrière et nous y ajoutons le portrait d’un passionné d’opéra, un de nos grands écrivains. Enfin, nous vous présentons également un mécène aimant depuis toujours la musique et la voix. Bonne lecture !
Elle chantait trop fort dans une chorale, on a ouvert une classe de chant exprès pour elle ! Mais c’est le hasard qui l’a ramenée vers l’art lyrique après des années d’exil professionnel. Partez à la rencontre de la soprano Myriam Leblanc.
C’est une curieuse histoire que la vôtre (en tant que chanteuse classique, je veux dire). Comme une sorte de valse-hésitation qui est devenue aujourd’hui une véritable histoire d’amour. Racontez-nous votre parcours.
J’ai commencé tout d’abord par apprendre le violon – j’en jouais jusqu’à tout récemment d’ailleurs, mais moins en ce moment bien sûr, le temps me manque. J’ai joué lors de cérémonies de mariage ou de funérailles, mais aussi dans un groupe folk-pop, Humming Trees. Adolescente, je chantais dans une chorale (à l’École Pierre-Laporte, spécialisée en musique), ce que j’aimais beaucoup. Mais on me disait toujours : « Myriam, tu chantes trop fort ! ». Puis, j’ai participé au camp musical de Lanaudière, celui du père Lindsay.
En tant que violoniste ou en tant que chanteuse ?
Violoniste… puis chanteuse. Je m’explique : l’un des cours offerts lors du camp était donné par Marie-Annick Béliveau. On y entendait un opéra (La Bohème), et le travail à réaliser était de monter un extrait sur scène. Dans ce cas, il s’agissait du choeur d’enfants que l’on entend dans l’opéra. Marie-Annick m’a tout de suite abordée en me disant qu’elle aimait ma voix. Elle m’a dit que je devrais suivre des cours. Je lui ai spontanément demandé si elle voudrait le faire. On a ouvert une classe de chant pour le reste de la durée du camp pour moi seule ! J’ai même délaissé le violon pendant cette période. Cela a été le déclic, le coup de foudre.
Que ressentiez-vous à ce moment-là ?
Beaucoup de confiance. Avec le violon, chaque fois que je jouais, je vivais du stress. Avec le chant, pas du tout ! Je me sentais parfaitement à ma place.
Cette nouvelle voie tournée vers le chant ne s’est jamais arrêtée depuis ?
Cela n’a pas été aussi simple. Je suis allée étudier et me suis retrouvée à McGill, où l’expérience n’a pas été concluante pour moi. On m’a beaucoup appris, je le sais avec le recul maintenant, mais il semble que ce processus n’ait pas été optimal pour mon développement. Je suis donc partie et j’ai quitté, totalement, le monde du chant. Je suis devenue barmaid dans un hôtel et me suis lancée en affaires en investissant dans l’immobilier.
Tout un contraste ! Comment êtes-vous revenue au chant ?
C’est en partie dû au hasard. À un certain moment, la musique me manquait. Je me suis alors lancée dans la direction chorale avec Robert Ingari. Cet homme m’a redonné le goût et le plaisir de la musique. Parfois, à l’occasion, quand il nous manquait des solistes, il me demandait de chanter. J’acceptais un peu à reculons, mais je le faisais. Puis, une amie, chef de choeur elle aussi, m’a dit que je devrais suivre des cours. J’étais évidemment réticente à cette idée, mais elle m’a convaincue d’essayer au moins une fois avec Yolande Parent de l’Université de Montréal. Quel miracle cette femme ! Elle m’a redonné confiance en mes moyens, m’a aidée à corriger ma technique, et tout cela très rapidement. Elle m’a aussi obligée à m’inscrire à des concours, comme celui de l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières. J’y suis allée en ne pensant à rien, en ne me faisant aucune illusion. Mais je l’ai remporté ! J’en ai été sincèrement renversée. Yolande m’a également obligée à tenter ma chance à l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, et là aussi, ça a fonctionné. Ce qui m’arrive depuis quelques années seulement, après un cheminement très chaotique, est tout simplement incroyable !
Après plusieurs années d’arrêt, avez-vous rencontré des difficultés à vous remettre dans le bain, comme on dit ?
Non, pas du tout. Yolande a été merveilleuse et m’a parfaitement accompagnée. J’ai appris à bien écouter mon corps et à le respecter. Et j’ai découvert à quel point ce métier est en fait exceptionnel. Imaginez : y a-t-il un autre job où l’on passe son temps à faire attention à son bien-être physique et mental ? Nous devons sans arrêt être en état de détente, car il est impossible de bien chanter si l’on est tendu. Pour bien faire ce métier, nous devons d’abord nous faire du bien. C’est le plus beau métier du monde.
La question prévisible que l’on pose toujours à une jeune artiste : admirez-vous une chanteuse en particulier ?
Un cliché peut-être : Maria Callas. Pour sa présence scénique, pour son investissement total dans le drame et dans le théâtre de l’opéra. Sa technique n’était peut-être pas la plus parfaite, mais elle était certainement la plus touchante, la plus émouvante.
Donc, si vous deviez choisir entre investir votre énergie dans la perfection technique ou le drame théâtral d’un opéra, ce serait…
Le drame ! L’opéra doit toucher le coeur et l’âme.
Quelle est votre vie « hors opéra » ?
Des choses simples, toutes liées aux relations humaines : famille, amis, soupers avec du bon vin. La nature, aussi : randonnées, camping, vélo. Rien qui ne fasse trop princesse. J’en suis l’antithèse.